The Grapes of Wrath ou comment filer à l'anglaise
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The Grapes of Wrath ou comment filer à l'anglaise
http://www.guardian.co.uk/commentisfree/2009/sep/08/tanya-gold-venice-hates-tourists?commentpage=3
Ou comment jeter des braises sur le feu...
Ou comment jeter des braises sur le feu...
condorcet- Nombre de messages : 2531
Date d'inscription : 03/03/2008
Re: The Grapes of Wrath ou comment filer à l'anglaise
Elle à la dent dure la journaliste, mais comme toujours les réactions des lecteurs semblent un peu plus modérées.
Re: The Grapes of Wrath ou comment filer à l'anglaise
Et tu n'as pas vu l'ire de venessia.com
Quand on va à San Marco en plein été et sans dégoiser un mot d'italien, il est difficile de s'étonner d'une certaine nervosité des autochtones.
Il me semblait que Massimo Cacciari ne s'était finalement pas rallié à l'idée d'une l'instauration d'une taxe à l'entrée de Venise pour les touristes sans hébergement....;
Toujours la même chose : l'événementiel culturel, une publicité monstre et on s'étonne d'avoir des clients...
Quand on va à San Marco en plein été et sans dégoiser un mot d'italien, il est difficile de s'étonner d'une certaine nervosité des autochtones.
Il me semblait que Massimo Cacciari ne s'était finalement pas rallié à l'idée d'une l'instauration d'une taxe à l'entrée de Venise pour les touristes sans hébergement....;
Toujours la même chose : l'événementiel culturel, une publicité monstre et on s'étonne d'avoir des clients...
condorcet- Nombre de messages : 2531
Date d'inscription : 03/03/2008
Re: The Grapes of Wrath ou comment filer à l'anglaise
"Mais en majorité, les touristes du XVIIIe siècle n'étaient guère plus intelligents que ne le sont ceux d'aujourd'hui"...
Une phrase à l'emporte-pièce...
Je ne suis pas spécialiste de l'histoire moderne (XVIe - XVIIIè siècles) mais me demande souvent la part du déterminisme dans le récit historique. Comme on sait que la République de Venise s'est effondrée en 1797, on en déduit que le gouvernement de la Cité, la décadence des moeurs y ont présidé : la morale de l'histoire en quelque sorte. L'historien, tel un peintre, devrait s'attacher à utiliser la variété des couleurs présentes dans sa palette, nuancer davantage pour éviter ce travers que Lucien Febvre appelait "l'anachronisme psychologique" (cf critique d'Alain Corbin dans "Le Monde des livres" à propos du dernier essai de Nicolas Offenstadt). C'est bien ce qui, à l'inverse de mes professeurs, m'a toujours dérangé dans "L'étrange défaite" de Marc Bloch. La métaphore historique de la Chute (de la Bible à Nana...).
Une phrase à l'emporte-pièce...
Je ne suis pas spécialiste de l'histoire moderne (XVIe - XVIIIè siècles) mais me demande souvent la part du déterminisme dans le récit historique. Comme on sait que la République de Venise s'est effondrée en 1797, on en déduit que le gouvernement de la Cité, la décadence des moeurs y ont présidé : la morale de l'histoire en quelque sorte. L'historien, tel un peintre, devrait s'attacher à utiliser la variété des couleurs présentes dans sa palette, nuancer davantage pour éviter ce travers que Lucien Febvre appelait "l'anachronisme psychologique" (cf critique d'Alain Corbin dans "Le Monde des livres" à propos du dernier essai de Nicolas Offenstadt). C'est bien ce qui, à l'inverse de mes professeurs, m'a toujours dérangé dans "L'étrange défaite" de Marc Bloch. La métaphore historique de la Chute (de la Bible à Nana...).
condorcet- Nombre de messages : 2531
Date d'inscription : 03/03/2008
Re: The Grapes of Wrath ou comment filer à l'anglaise
L'ami Braudel m'enchante :
"Avec le XVIè siècle, Venise décline, c'est un fait. Mais sur ce repli qui n'a pas eu les allures d'une débacle, qui n'est pas la suite logique d'erreurs humaines qui mettraient tout en cause, je voudrais plaider avec un peu d'humeur. Est-ce permis ? Je crois que c'est bel et bien nécessaire [...] Sur le moment, Venise n'est pas consciente du triomphe des autres et surtout du fait que la vie économique, silencieusement mais efficacement, la rejette vers des positions secondes, en attendant pire encore. Les Vénitiens, si lucides soient-ils, ont sous les yeux le spectacle de leur ville resplendissante. A Lépante (5 octobre 1571), elle a remporté la plus grande victoire de tout son passé. Et quand, en 1585, Véronèse peint le plafond de la salle du Collegio au plais ducal (après l'incendie du palais en 1577), il le consacre au triomphe de Vénus [...] L'Europe se tourne à la fois vers le Nord et vers le grand large de l'Atlantique. Ce mouvement en direction d'Amsterdam c'est, toutes choses égales, quelque chose d'analogue au transfert du centre du monde hier, vers les années 1929-1934, de Londres vers New York. Londres n'en porte pas la responsabilité. Et elle non plus n'a pas compris aussitôt ce qui lui arrivait Alors n'accusons pas, ne disons pas, comme beaucoup de Vénitiens eux-mêmes, que la déchéance de la République a été la suite de la détérioration des moeurs et du courage des citoyens. Quel aveuglement ! Jamais Venise n'a été aussi courageuse, aussi acharnée contre le Turc, qu'à l'époque de Lépante ou qu'au XVIIè siècle, et même jusqu'à la paix de Passarowitz (1718) [jurée entre Venise et l'Empire Ottoman, elle entérine la présence ottomane en Grèce, soit le début de la fin pour Venise] qui marquera le terme de ses efforts surhumains [...] En 1918, la France triomphe comme Venise à Lépante ; en 1945, l'Angleterre, qui a sauvé le monde libre, décline inéluctablement... Autant dire que la décadence n'est pas une exception. Après le flux - l'ascension de l'Espagne dont l'Empire devient si vaste qu'il ne connaît pas de crépuscule ou, comme l'on dit plus souvent, que le soleil ne s'y couche jamais ; de la France de Louis XIV à Napoléon ; de l'Angleterre de Wellington et de la reine Victoria - surgit le reflux, bien plus rapide que l'eau montante. Venise a été prise dans un jeu aussi vieux que le monde est monde [...] Donc avant de parler de la Venise en fête du XVIIIe siècle - ce spectacle que vous attendez et que j'ai l'air de vous refusez -, n'oubliez pas cette bonne santé économique, du haut en bas de l'échelle sociale, ce travail puissant, ces réussites. Songez que si nos répérages sont exacts, de 1669 à 1798, soit durant plus d'un siècle, se sont construits ou reconstruits à Venise une quarantaine de palais, une quarantaine d'églises, une douzaine de théâtres, une demi-douzaine d'hôpitaux, une douzaine de "scuole". Ajoutez au compte 600 villas en Terre Ferme. Il est vrai que cette énorme activité, extraordinaire, de 1669 à 1688, vive de 1698 à 1768, se ralentit par la suite [...] Si Venise offre à l'Europe le spectacle de ses fêtes, c'est qu'elle est en mesure de les organiser. La flamme qui l'éclaire est d'abord sa propre flamme [...] Historien, je sais d'ailleurs que malgré les discours vertueux qui ne manquent jamais, la "moralité" a été et sera sans doute toujours mauvaise, et selon tels juges, exécrables [...] Le XIXe siècle a abîmé Venise..." in BRAUDEL Fernand, QUILICI Folco, "Venise", Paris, Arthaud, 1984, p.86, 91, 92, 101,
"Avec le XVIè siècle, Venise décline, c'est un fait. Mais sur ce repli qui n'a pas eu les allures d'une débacle, qui n'est pas la suite logique d'erreurs humaines qui mettraient tout en cause, je voudrais plaider avec un peu d'humeur. Est-ce permis ? Je crois que c'est bel et bien nécessaire [...] Sur le moment, Venise n'est pas consciente du triomphe des autres et surtout du fait que la vie économique, silencieusement mais efficacement, la rejette vers des positions secondes, en attendant pire encore. Les Vénitiens, si lucides soient-ils, ont sous les yeux le spectacle de leur ville resplendissante. A Lépante (5 octobre 1571), elle a remporté la plus grande victoire de tout son passé. Et quand, en 1585, Véronèse peint le plafond de la salle du Collegio au plais ducal (après l'incendie du palais en 1577), il le consacre au triomphe de Vénus [...] L'Europe se tourne à la fois vers le Nord et vers le grand large de l'Atlantique. Ce mouvement en direction d'Amsterdam c'est, toutes choses égales, quelque chose d'analogue au transfert du centre du monde hier, vers les années 1929-1934, de Londres vers New York. Londres n'en porte pas la responsabilité. Et elle non plus n'a pas compris aussitôt ce qui lui arrivait Alors n'accusons pas, ne disons pas, comme beaucoup de Vénitiens eux-mêmes, que la déchéance de la République a été la suite de la détérioration des moeurs et du courage des citoyens. Quel aveuglement ! Jamais Venise n'a été aussi courageuse, aussi acharnée contre le Turc, qu'à l'époque de Lépante ou qu'au XVIIè siècle, et même jusqu'à la paix de Passarowitz (1718) [jurée entre Venise et l'Empire Ottoman, elle entérine la présence ottomane en Grèce, soit le début de la fin pour Venise] qui marquera le terme de ses efforts surhumains [...] En 1918, la France triomphe comme Venise à Lépante ; en 1945, l'Angleterre, qui a sauvé le monde libre, décline inéluctablement... Autant dire que la décadence n'est pas une exception. Après le flux - l'ascension de l'Espagne dont l'Empire devient si vaste qu'il ne connaît pas de crépuscule ou, comme l'on dit plus souvent, que le soleil ne s'y couche jamais ; de la France de Louis XIV à Napoléon ; de l'Angleterre de Wellington et de la reine Victoria - surgit le reflux, bien plus rapide que l'eau montante. Venise a été prise dans un jeu aussi vieux que le monde est monde [...] Donc avant de parler de la Venise en fête du XVIIIe siècle - ce spectacle que vous attendez et que j'ai l'air de vous refusez -, n'oubliez pas cette bonne santé économique, du haut en bas de l'échelle sociale, ce travail puissant, ces réussites. Songez que si nos répérages sont exacts, de 1669 à 1798, soit durant plus d'un siècle, se sont construits ou reconstruits à Venise une quarantaine de palais, une quarantaine d'églises, une douzaine de théâtres, une demi-douzaine d'hôpitaux, une douzaine de "scuole". Ajoutez au compte 600 villas en Terre Ferme. Il est vrai que cette énorme activité, extraordinaire, de 1669 à 1688, vive de 1698 à 1768, se ralentit par la suite [...] Si Venise offre à l'Europe le spectacle de ses fêtes, c'est qu'elle est en mesure de les organiser. La flamme qui l'éclaire est d'abord sa propre flamme [...] Historien, je sais d'ailleurs que malgré les discours vertueux qui ne manquent jamais, la "moralité" a été et sera sans doute toujours mauvaise, et selon tels juges, exécrables [...] Le XIXe siècle a abîmé Venise..." in BRAUDEL Fernand, QUILICI Folco, "Venise", Paris, Arthaud, 1984, p.86, 91, 92, 101,
condorcet- Nombre de messages : 2531
Date d'inscription : 03/03/2008
Re: The Grapes of Wrath ou comment filer à l'anglaise
Fernand Braudel évoque aussi un livre de Jean Georgelin : "Le mérite du beau livre de Jean Georgelin c'est d'avoir montré la place primordiale qu'il faut accorder au travail du vaste peuple de Venise. Pour une fois, il nous sera possible de le voir au-delà des nobles gourmés et des bourgeois - les "cittadini" -, privilégiés de second rang, claquemurés dans leurs maisons, leurs préjugés et leurs petites affaires".BRAUDEL Fernand, op. cit., p.99.
Donc : GEORGELIN Jean, "Venise au siècle des Lumières", Paris/La Haye, Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales/Mouton, 1978...
Ah... L'histoire des techniques...
Donc : GEORGELIN Jean, "Venise au siècle des Lumières", Paris/La Haye, Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales/Mouton, 1978...
Ah... L'histoire des techniques...
condorcet- Nombre de messages : 2531
Date d'inscription : 03/03/2008
Re: The Grapes of Wrath ou comment filer à l'anglaise
A défaut de pouvoir acquérir l'ouvrage vendu au prix de l'or par les éditions de l'EHESS (91 euros + les frais de port dont les Parisiens pourront peut-être faire l'économie), on pourra le feuilleter ici :
http://books.google.fr/books?id=O01ZjBX3MRwC&dq=venise+au+si%C3%A8cle+des+lumi%C3%A8res&printsec=frontcover&source=bl&ots=gPq2rjONYo&sig=cxl9pKOdEV_u2m6_J7Lid-btjBA&hl=fr&ei=LGWuSsCqMJihjAeWy_D8Bw&sa=X&oi=book_result&ct=result&resnum=1#v=onepage&q=&f=false
http://books.google.fr/books?id=O01ZjBX3MRwC&dq=venise+au+si%C3%A8cle+des+lumi%C3%A8res&printsec=frontcover&source=bl&ots=gPq2rjONYo&sig=cxl9pKOdEV_u2m6_J7Lid-btjBA&hl=fr&ei=LGWuSsCqMJihjAeWy_D8Bw&sa=X&oi=book_result&ct=result&resnum=1#v=onepage&q=&f=false
condorcet- Nombre de messages : 2531
Date d'inscription : 03/03/2008
Re: The Grapes of Wrath ou comment filer à l'anglaise
Une consolation : la bouteille assortie au livre coûte plus du triple. Savourer les mots ou émoustiller les papilles, telle est la question
http://www.1855.com/vin/1500784/fr/mouton-rothschild-1978/
http://www.1855.com/vin/1500784/fr/mouton-rothschild-1978/
condorcet- Nombre de messages : 2531
Date d'inscription : 03/03/2008
Re: The Grapes of Wrath ou comment filer à l'anglaise
bon, je vais revenir décortiquer plus tard les textes de Condorcet, qui m'épate par l'étendue de sa culture et l'à-propos de ses citations, tout bêtement après avoir lu l'article de la journaliste anglaise, je ferai une réfléxion très terre à terre : ceux qui bouffent mal n'ont pas cherché plus loin que les autres membres du troupeau, ceux qui sont mal reçus n'ont pas cherché à voir plus loin que l'image stéréotypée du vendeur d'ice cream, ceux qui sont des touristes moutoniers n'auront accès qu'au pré des moutons ...et c'est valable pour tous les endroits de la terre, me semble t il ...... c'est typiquement un article qui veuit faire vendre, qui veut provoquer des réactions identiques, des "témoignages" indignés , c'est le guide du tour d'europe en car qui fait et défait les réputations des hotels et des boutiques, selon qu'il est bien "arrosé" ou pas ......
maintenant, cette histoire de péage ....... j'ai déjà entendu ça ailleurs .....
maintenant, cette histoire de péage ....... j'ai déjà entendu ça ailleurs .....
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