La gratuité de la culture, un principe encore d'actualité ?
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La gratuité de la culture, un principe encore d'actualité ?
http://www.lefigaro.fr/culture/2008/08/12/03004-20080812ARTFIG00573-frequentation-record-pour-les-sites-culturels-parisiens-.php
S'il est légitime de se préoccuper de la fréquentation des musées nationaux, il semble moins vertueux de vouloir privilégier la rentabilité et le quantitatif aux dépens du principe essentiel qui prévalait à l'origine : la culture la plus choisie à destination du plus grand nombre et ce, sans exclusive. A cette aune, le succès rencontré par les musées parisiens devrait me réjouir. Et pourtant... la prolifération des produits dérivés, la préférence aux touristes les plus fortunés, la multiplication des opérations plus spectaculaires que vraiment fécondes ("Nuit blanche", "Journées du patrimoine"...) sont l'arbre qui cache une forêt. Le très distingué Ministère de la culture publie depuis 1989 des statistiques sur les pratiques culturelles des Français qui brosse un tableau moins louangeur et plus encore, les chiffres clés publiés par le Ministre de la culture en 2008 invitent à nuancer le tableau.
Pourquoi ? En 2006, la fréquentation des musées a été très hétérogène : sur 1152 musées nationaux, 12 musées reçoivent une fréquentation supérieure ou égale à 500 000 entrées, 54 musées reçoivent une fréquentation comprise entre 100 000 et 500 000 entrées mais 484 musées reçoivent une fréquentation inférieure à 10 000 entrées et 156 musées sont fermés. L'inégalité entre musées nationaux est double : d'abord, les musées les plus plébiscités se trouvent presque tous dans la région parisienne; ensuite, un nombre restreint de musées reçoivent la manne financière qui suit leurs fréquentations records. Par exemple, le musée de la Renaissance à Ecouen en 2006 n'a convaincu que 56 000 visiteurs de le découvrir.
Plus préoccupantes sont les statistiques de pratiques culturelles des Français pour l'année 2006 : seulement 39 % des Français(es) de 15 ans et plus ont visité un musée ou une exposition de leur pays durant cette année. Pire, l'inégalité culturelle qui s'observe entre les plus démunis et les plus dotés financièrement se retrouve ici puisque 75% des ouvriers n'ont visité aucun musée ni exposition pendant l'année contre 34 % des cadres et professions intellectuels supérieures. Le postulat de la démocratisation culturelle, fondement des musées, se retrouve battu en brèche. La culture savante, classique ou plus ouverte, telle qu'elle est proposée par nos musées nationaux, intéresse globalement des publics déjà sensibles à la dimension exotique de ce qui leur est proposé. Au contraire, les publics réfractaires le restent.
Ainsi si l'on peut se féliciter à bon droit des 58% de visiteurs qui découvrent le Louvre pour la première fois et des 67 % de visiteurs venus de l'étranger pour ce lieu illustre, en revanche, on peut s'interroger sur une logique qui pousse les musées à rechercher ressources propres (faire tourner entrées et surtout boutiques et produits dérivés) et mécénat d'entreprise (souvent dans le cadre de projets bien spécifiques comme la restauration de la Galerie des Glaces par le groupe de Bâtiments et Travaux Publics Vinci qui se voyait octroyer en retour des facilités comme la gratuité de la visite aux actionnaires qui en feraient la demande) aux dépens d'un financement public, plus complet, amoureux de l'art et non pas simplement de la recette ou de la publicité immédiate.
La culture exige l'investissement sur le moyen et le long terme. Est-ce en fermant quelques lieux illustres comme le musée national des Arts et Traditions populaires (il rouvrira bientôt, ce dont je me réjouis) ou en dispersant le patrimoine de l'Imprimerie national que l'on montre tout son attachement à une diffusion plurielle des savoirs et techniques patiemment acquis à travers les siècles ? J'en doute.
S'il est légitime de se préoccuper de la fréquentation des musées nationaux, il semble moins vertueux de vouloir privilégier la rentabilité et le quantitatif aux dépens du principe essentiel qui prévalait à l'origine : la culture la plus choisie à destination du plus grand nombre et ce, sans exclusive. A cette aune, le succès rencontré par les musées parisiens devrait me réjouir. Et pourtant... la prolifération des produits dérivés, la préférence aux touristes les plus fortunés, la multiplication des opérations plus spectaculaires que vraiment fécondes ("Nuit blanche", "Journées du patrimoine"...) sont l'arbre qui cache une forêt. Le très distingué Ministère de la culture publie depuis 1989 des statistiques sur les pratiques culturelles des Français qui brosse un tableau moins louangeur et plus encore, les chiffres clés publiés par le Ministre de la culture en 2008 invitent à nuancer le tableau.
Pourquoi ? En 2006, la fréquentation des musées a été très hétérogène : sur 1152 musées nationaux, 12 musées reçoivent une fréquentation supérieure ou égale à 500 000 entrées, 54 musées reçoivent une fréquentation comprise entre 100 000 et 500 000 entrées mais 484 musées reçoivent une fréquentation inférieure à 10 000 entrées et 156 musées sont fermés. L'inégalité entre musées nationaux est double : d'abord, les musées les plus plébiscités se trouvent presque tous dans la région parisienne; ensuite, un nombre restreint de musées reçoivent la manne financière qui suit leurs fréquentations records. Par exemple, le musée de la Renaissance à Ecouen en 2006 n'a convaincu que 56 000 visiteurs de le découvrir.
Plus préoccupantes sont les statistiques de pratiques culturelles des Français pour l'année 2006 : seulement 39 % des Français(es) de 15 ans et plus ont visité un musée ou une exposition de leur pays durant cette année. Pire, l'inégalité culturelle qui s'observe entre les plus démunis et les plus dotés financièrement se retrouve ici puisque 75% des ouvriers n'ont visité aucun musée ni exposition pendant l'année contre 34 % des cadres et professions intellectuels supérieures. Le postulat de la démocratisation culturelle, fondement des musées, se retrouve battu en brèche. La culture savante, classique ou plus ouverte, telle qu'elle est proposée par nos musées nationaux, intéresse globalement des publics déjà sensibles à la dimension exotique de ce qui leur est proposé. Au contraire, les publics réfractaires le restent.
Ainsi si l'on peut se féliciter à bon droit des 58% de visiteurs qui découvrent le Louvre pour la première fois et des 67 % de visiteurs venus de l'étranger pour ce lieu illustre, en revanche, on peut s'interroger sur une logique qui pousse les musées à rechercher ressources propres (faire tourner entrées et surtout boutiques et produits dérivés) et mécénat d'entreprise (souvent dans le cadre de projets bien spécifiques comme la restauration de la Galerie des Glaces par le groupe de Bâtiments et Travaux Publics Vinci qui se voyait octroyer en retour des facilités comme la gratuité de la visite aux actionnaires qui en feraient la demande) aux dépens d'un financement public, plus complet, amoureux de l'art et non pas simplement de la recette ou de la publicité immédiate.
La culture exige l'investissement sur le moyen et le long terme. Est-ce en fermant quelques lieux illustres comme le musée national des Arts et Traditions populaires (il rouvrira bientôt, ce dont je me réjouis) ou en dispersant le patrimoine de l'Imprimerie national que l'on montre tout son attachement à une diffusion plurielle des savoirs et techniques patiemment acquis à travers les siècles ? J'en doute.
condorcet- Nombre de messages : 2531
Date d'inscription : 03/03/2008
Re: La gratuité de la culture, un principe encore d'actualité ?
Le prêt des collections est une pratique habituelle des musées même si l'on peut rester dubitatif devant la multiplication de l'événementiel au détriment d'une véritable politique culturelle. En d'autres termes, du "tape-à-l'oeil", voire de l'esbrouffe aux dépens d'un respect des spécificités de chaque lieu d'exposition. Le musée du Quai d'Orsay a choisi de prêter certaines de ses oeuvres (il est vrai que certaines salles d'exposition ne faisait pas honneur aux impressionnistes....)... moyennant rétribution. On retrouve une logique assez répandue depuis le tarissement des financements public et privé : générer en interne des recettes , changer une institution publique en organisation marchande. Qui veut ma belle carte postale de l'Angélus, mon beau buste de Rodin en modèle réduit... ?
http://www.lemonde.fr/archives/article/2009/10/01/orsay-va-preter-des-tableaux-majeurs-pendant-un-an-pour-10-millions-d-euros_1247871_0.html
Les biens culturels ou marchands voyagent le plus librement du monde : on aimerait pouvoir en dire autant des êtres qui les accumulent, convoitent ou contemplent.
http://www.lemonde.fr/archives/article/2009/10/01/orsay-va-preter-des-tableaux-majeurs-pendant-un-an-pour-10-millions-d-euros_1247871_0.html
Les biens culturels ou marchands voyagent le plus librement du monde : on aimerait pouvoir en dire autant des êtres qui les accumulent, convoitent ou contemplent.
condorcet- Nombre de messages : 2531
Date d'inscription : 03/03/2008
Re: La gratuité de la culture, un principe encore d'actualité ?
http://passouline.blog.lemonde.fr/2011/02/05/bibliotheques-les-lecteurs-entrent-en-resistance
Dans un pays limitrophe : le Royaume-Uni, des bibliothèques publiquent ferment. Si les thèses néo-libérales voire social-démocrates continuent à prévaloir en Europe, combien de temps faudra-t-il pour que ce triste précédent se généralise. Ah, j'oubliais le sacro-saint équilibre budgétaire : appauvrir la sphère publique pour renforcer les opérateurs privés de tous poils ....
Dans un pays limitrophe : le Royaume-Uni, des bibliothèques publiquent ferment. Si les thèses néo-libérales voire social-démocrates continuent à prévaloir en Europe, combien de temps faudra-t-il pour que ce triste précédent se généralise. Ah, j'oubliais le sacro-saint équilibre budgétaire : appauvrir la sphère publique pour renforcer les opérateurs privés de tous poils ....
condorcet- Nombre de messages : 2531
Date d'inscription : 03/03/2008
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